Epidémie de chikungunya à la réunion
(Conseils aux
voyageurs)
(en date du 02
février 2006)
Qu’appelle-t-on le
Chikungunya ?
Le Chikungunya est une maladie due à un virus
(arbovirus) transmis par les moustiques. Le nom de cette zoonose (maladie
animale transmissible à l’homme) signifie en Souhaéli « marcher
courbé », décrivant l’attitude des personnes atteintes par le virus. Les
primates constituent le principal réservoir habituel du virus au même titre que
le bétail domestique notamment. La maladie a été décrite principalement en
Afrique, en Asie du sud-est, au sud de l’Inde et au Pakistan. Elle se manifeste
surtout pendant la saison des pluies quand la concentration de moustiques est
la plus forte.
Comment se transmet la
maladie ?
La maladie se transmet à homme par l’intermédiaire
de moustiques du genre Aedes notamment. A la Réunion, le moustique
suspecté d’être le vecteur est Aedes albopictus. C’est un moustique
diurne ayant un pic d’activité en début et en fin de journée ; celui-ci
prélève le virus en piquant une personne atteinte de la maladie pendant la
phase de virémie et se contamine à son tour. Lors d’une autre piqûre, il peut
transmettre le virus à une personne saine.
Existe-t-il une transmission
du virus d’homme à homme ?
Non, la transmission s’effectue uniquement par le
biais d’un moustique vecteur. Les personnes atteintes du Chikungunya ne sont
donc contagieuses ni par contact, ni par le biais des postillons. Néanmoins, la transmission artificielle par la transfusion
sanguine et la greffe est théoriquement possible, d’où les mesures de
précaution prises pour écarter notamment du don de sang les personnes atteintes
de la maladie.
, La possibilité de transmission
materno-fœtale a été évoquée dans un petit nombre de cas à la Réunion. Une
telle transmission n’avait jusqu’ici jamais été rapportée dans la littérature.
Quels sont les symptômes de
la maladie ?
La maladie, d’évolution spontanée le plus souvent
favorable , peut dans certains cas entraîner une fatigue prolongée et des
douleurs articulaires récidivantes parfois invalidantes. Quelques cas à type de
méningo-encéphalites ont été signalés, dont l’évolution a été favorable.
Non, toute personne qui a été infectée une fois
acquiert naturellement une immunité durable (plusieurs années). En revanche,
certaines douleurs aux articulations (arthralgies) peuvent persister ou
réapparaître sur des périodes de temps variables. Il s’agit d’une réaction
articulaire indépendante d’une réinfection par le virus.
La confirmation biologique d’une infection à virus chikungunya s’effectue par analyse sérologique (recherche dans le sang d’anticorps spécifiques au virus), cet examen ne s’impose pas en zone épidémique, mais peut être utile pour faire un diagnostic différentiel. Les méthodes microbiologiques (isolement du virus, PCR) ne sont pas réalisées en routine et sont effectuées dans des laboratoires spécialisés .
Il n’existe pas de thérapeutique spécifique contre le Chikungunya. Le traitement est symptomatique et repose avant tout sur la prise d’antalgiques et anti-inflammatoires non stéroïdiens et le repos. Il est important de consulter un médecin en cas de signes évocateurs, d’une part pour éviter d’ignorer un autre diagnostic, d’autre part pour adapter le traitement, notamment en cas de pathologies associées et dans tous les cas pour les enfants.
Il n’existe pas de vaccin contre le Chikungunya ni de traitement préventif de la maladie.
L’épidémie a débuté à la Réunion en mars 2005. Après une période d’accalmie entre juillet et septembre 2005 pendant l’hiver austral, l’épidémie a ensuite rapidement progressé atteignant fin janvier 2006 plusieurs milliers de cas par semaine. L’ensemble de l’île est touché, mises à part les zones d’altitude où la présence de moustiques est faible. (cf. point de situation épidémiologique actualisé sur www.invs.sante.gouv.fr).
Le risque de maladies transmises par les vecteurs est constant, tout au long de l’année ou de façon sporadique, dans de nombreux pays. Il est donc important de connaître les mesures de prévention individuelle contre les piqûres de moustiques à prévoir avant le voyage (cf. question sur la protection) et les symptômes des différentes maladies afin de consulter un médecin rapidement s’ils surviennent au décours d’un voyage. S’agissant de voyages avec des jeunes nourrissons, les moyens de protection contre les piqûres de moustiques sont extrêmement limités (impossibilité d’utiliser des répellents avant 3 mois, seule la moustiquaire imprégnée de perméthrine peut les protéger), mais surtout ces derniers peuvent être fragilisés du fait des conditions climatiques et parfois d’hygiène selon les conditions du séjour. Il appartient donc aux familles de se déterminer sur l’intérêt d’un séjour touristique avec un jeune nourrisson dans les zones où des maladies transmises par les moustiques sont endémiques ou épidémiques.
Outre les mesures de protection individuelles (cf question spécifique), la lutte contre la maladie passe par la prévention de la prolifération des moustiques, c’est à dire par la réduction de toutes les sources potentielles de gîtes larvaires constituées par les eaux stagnantes et tout récipient susceptible de retenir les eaux de pluie (pots de fleurs, pneus usagers, gouttières de toit, etc…) et par l’application de traitements larvicides lorsque la suppression de ces sources n’est pas possible. Par ailleurs, cette lutte est également axée contre le moustique adulte au moyen de pulvérisation d’insecticide en zone infectée. La prévention dans l’habitat local repose sur l’utilisation d’insecticides autour des ouvertures des portes et des fenêtres, ainsi que l’utilisation de moustiquaires.
Pour réduire la présence de moustiques autour de son
habitation, il faut détruire les gîtes larvaires, c’est-à-dire les lieux de
ponte du moustique Après chaque pluie, il est conseillé
d'effectuer une visite autour de la maison et de supprimer tous les récipients,
objets divers, déchets, végétation qui contiennent de l'eau, car c'est dans ces
rétentions d'eau que le moustique va pondre.
Les récipients de stockage d’eau de pluie doivent être fermés hermétiquement ou recouverts d’une moustiquaire, les soucoupes sous les pots de fleurs doivent être supprimées, l’eau des vases à boutures doit être renouvelée une fois par semaine. Les récipients exposées à la pluie doivent être retournés ou mis à l’abri de la pluie, les pneus et détritus abandonnés dans le jardin doivent être éliminés (ou percés pour les pneus), les gouttières bouchées avec stagnation d’eau doivent être réparées, les piscines abandonnées et les bassins doivent être chlorés, empoissonnés ou remplis de sable.
Comment protéger les adultes
contre le Chikungunya ?
La prévention individuelle repose sur les moyens de protection contre les piqûres de moustique en utilisant différents moyens physiques et chimiques :
Il est recommandé :
-
de
porter dans la journée (principalement en début et fin de journée,
périodes d’intense activité du moustique vecteur) des vêtements amples et long
couvrant également les bras et les jambes jusqu’aux chevilles,
-
d’imprégner
les vêtements avec un produit insecticide spécial pour tissu, notamment dans
les zones de prolifération intense des moustiques ou en cas de contre
indication aux répulsifs (nouveau-nés, nourrissons jusqu’à trois mois),
-
d’utiliser
des répulsifs sur les zones de la peau découvertes. Des précautions sont à
respecter chez la femme enceinte et l’enfant (prendre avis auprès de son
médecin ou d’un pharmacien).
-
d’utiliser
des moustiquaires, des diffuseurs électriques à l’intérieur des maisons et des
« bandeaux collants » imprégnés d’insecticide fixés au plafond des
pièces de l’habitat.
(cf tableaux disponibles sur le site du ministère de
la santé dans le dossier Chikungunya,
http://www.sante.gouv.fr).
Quelles
sont les recommandations pour les femmes enceintes ?
Il est important de rappeler que les longs voyages aériens sont déconseillés en fin de grossesse. Il appartient donc d’évoquer tout projet de voyage avec son médecin traitant afin de se déterminer sur la pertinence ou non d’un séjour touristique à la Réunion. Par ailleurs, devant la possibilité de transmission materno-fœtale décrite lors de l’épidémie actuelle, même si le risque est très faible, il est fortement recommandé aux femmes enceintes de se prémunir contre les piqûres de moustiques et tout particulièrement au cours du dernier trimestre de la grossesse. Pour cela, outre les moyens de protection physique (port de vêtement longs couvrant les bras et les jambes jusqu’au chevilles, moustiquaires dans l’habitat, … cf question sur la protection), il leur est fortement recommandé d’utiliser un produit répulsif adapté en respectant les précautions d’emploi (cf tableaux disponibles sur le site du ministère de la santé dans le dossier Chikungunya, http://www.sante.gouv.fr).
Quelles
sont les recommandations pour nouveau-nés et les nourrissons ?
Outre les cas transmis par la mère au cours de la grossesse, les nourrissons sont susceptibles de faire une infection aiguë liée au virus chikungunya qui pourrait entraîner des troubles de l’alimentation, comme cela a été décrit à La Réunion pour une dizaine d’enfants de moins de 3 mois. Il faut donc protéger le jeune enfant des piqûres par les moustiques : chez l’enfant jusqu’à l’âge de trois mois, les produits répulsifs ne peuvent être utilisés. La prévention, outre le port de vêtements couvrant également les membres, repose essentiellement sur l’utilisation de moustiquaire de berceau (on peut imprégner la moustiquaire d’insecticides, cf tableaux disponibles sur le site du ministère de la santé dans le dossier Chikungunya, http://www.sante.gouv.fr).
Que faire si je suis malade
lors de mon séjour ?
Dois-je
me protéger aussi contre la piqûre des moustiques lorsque je suis atteint du
Chikungunya ?
Oui, il est indispensable de se protéger
contre les piqûres lorsqu’on présente les symptômes du Chikungunya. En effet,
pendant les 5 premiers jours de la maladie, la personne malade est porteuse du
virus dans son sang. Chaque moustique qui piquera une personne malade durant cette
période se contaminera en prélevant le sang et donc le virus. Se protéger
pendant cette période, c’est éviter de transmettre l’infection à son entourage.
Pour en savoir plus :
-
Ministère da la santé (dossier Chikungunya, fiches sur les moyens de protection) :
http://sante.gouv.fr
- Institut
national de veille sanitaire (point de situation épidémiologique, BEH Numéro spécial « Infection par le virus Chikungunya
à l’Ile de la Réunion » et BEH 24-25/2005 sur
« santé des voyageurs ») : http : //www.invs.sante.fr
- Observatoire régional de la santé de la Réunion (brochures d’information sur la lutte contre le Chikungunya) : http://www.orsrun.net
-
Agence
française de sécurité sanitaire des produits de santé :
http://www.afssaps.sante.fr
Source :
Direction Régionale
des Affaires Sanitaires et Sociales de
la Réunion (DRASS)
et Cellule
interrégionale d’épidémiologie (CIRE) Réunion-Mayotte
2 Bis Av. Georges
Brassens BP 9
97408 Saint Denis Cedex 9
Direction générale de
la santé
Sous direction des maladies infectieuses et politiques vaccinales (SD 5C ),
14 avenue Duquesne 75007 Paris
Rédaction : janvier 2006
En pratique
comment se protéger des piqûres de moustiques ?
La
prévention individuelle (1) passe par l’utilisation de moyens de
protection physiques et chimiques :
Porter des vêtements longs et protéger les pieds et chevilles est une mesure très efficace pour réduire l'exposition aux piqûres. L’imprégnation des vêtements par des insecticides à base de pyréthrinoïdes ou des répulsifs la renforce.
Les répulsifs absorbés dans les fibres des tissus
s’évaporent très lentement, augmentant ainsi la rémanence, et confèrent une
protection à plus long terme. Ceci offre des avantages en termes de
persistance, de coût et de sécurité d’emploi (contact avec la peau fortement
réduit par rapport à une application cutanée).
Des répulsifs peuvent également être appliqués sur
la peau ; ils contiennent un principe actif qui éloigne les insectes sans
toutefois les tuer. Des précautions d’emploi sont à respecter chez la femme enceinte
et l’enfant, et il convient de prendre conseil auprès d'un médecin ou d'un
pharmacien (voir tableau).
Synthèse sur les
recommandations d’utilisation des répulsifs (d’après IRD - Montpellier -
Janvier 2006)
Catégorie
d’Age |
Substance
Active |
Concentrations |
Noms
commerciaux |
<
3 mois |
-
Aucune |
- |
- |
De
3 mois à 2 ans |
-
Citriodiol |
30
à 50% |
Mosiguard
Naturel (Spray) |
De
2 ans à 12 ans (+
femmes enceintes) |
-
Citriodiol -
KBR 3023 -
IR3535 |
30
à 50% 20
à 30% 20 à 35% |
Mosiguard Naturel (Spray) Insect
Ecran spécial tropique (spray) Cinq
sur Cinq (lotion), Moustifluid zones infestées (spray), Prebutix lotion haute
protection (spray) |
>
12 ans sauf
femmes enceintes |
Tous
cités + DEET
b |
30
à 50% |
Insect
écran peau adulte (spray), |
Précautions d’emploi : Eviter le contact avec les
yeux et les muqueuses. Pas plus de 3 applications / jours.
a Liste non exhaustive: sont indiqués ici à titre indicatif,
quelques noms de formulations commerciales qui correspondent aux concentrations
indiquées (sans prendre en compte les associations de produits)
b Eviter les contacts du diéthyl toluamide (DEET) avec les
plastiques, vernis, verres de montres et lunettes, attention, le DEET diminue
l’efficacité des crèmes solaires (environ 1/3).
Pour les nouveau-nés et nourrissons avant trois mois
les produits répulsifs ne doivent pas être utilisés. L’emploi de moustiquaires
de berceau, si possible imprégnées d’insecticides pyréthrinoïdes (perméthrine,
deltaméthrine), est le seul moyen de protection efficace. Ces produits sont
d’une grande sécurité d’emploi et de longue durée d’action. Certaines
moustiquaires du commerce vendues déjà imprégnées ont des mailles larges et
ainsi permettent une meilleure ventilation tout en garantissant la protection
contre les moustiques du fait du traitement insecticide.
Dans l’habitat, le traitement systématique à l’aide
d’insecticides pyréthrinoïdes des rideaux de portes, voilages, fenêtres et
séparations intérieures, de même que l’utilisation de moustiquaires, sont
utiles en complément des plaquettes ou tortillons fumigènes (à l’extérieur ou
dans une pièce aérée).
La destruction des gîtes larvaires potentiels est très fortement recommandée
(ex : pots de fleurs, récipients divers, pneus usagés et déchets encombrants
divers constituent des zones d’eau stagnante…).
Toutefois aucune mesure n'est efficace a 100% et
c'est la somme de mesures individuelles et collectives qui permet de faire
diminuer la transmission.
(1) Pour plus de précisions,
voir BEH 24-25/2005 (santé des voyageurs), p.119. sur le site :http://www.invs.sante.fr/beh/default.htm